Comme il m'arrive de lire des bouquins (sic), je me propose de vous mettre quelques citations d'un ouvrage sympa et assez court de Didier Tronchet, qui s'intitule Football, mon amour
"Dès que le terrain de foot virtuel a surgi du sol, plus rien d'anodin ne peut se passer dans son champ d'attraction. On y respire un autre air. Dix mètres avant, l'herbe semble être la même. Et pourtant non. Au-delà même de la ligne de touche, le brin d'herbe est soudain électrique. Quelque chose vibre sur cette surface, quelque chose de l'ordre du sacré. Le non-initié n'a pas perçu la différence, qui traverse, indifférent, ce rectangle de pelouse vide comme n'importe quel pré à vache. Le footballeur, lui-même modeste, a ressenti les vibrations dans les chevilles, cet appel à courir, à sauter, à voler (sur l'aile)."
"Le terrain de football est un champ magnétique. Les deux pôles sont les buts. Ils nous aimantent; nos corps ne nous appartiennent plus et courent déjà décérébrés, sous le regard vide du non-initié, à qui ces transes sont à jamais interdites."
"Les noms des stades: Maracana, San Siro, Wembley... Ils vibrent dans nos mémoires d'afficionados comme des coups de tonnerre. Sous de pareils auspices, rien de banal ne peut se dérouler. Dans ces cathédrales puissamment nommées, on tutoie les anges. On est de plain-pied dans l'Histoire. Prononcer ces mots, c'est emboucher les trompettes du triomphe romain, annoncer d'ores et déjà la venue du Dieu Spectacle. Parc des Princes, Old Trafford, Stadio de la Luz... Ils ont en eux-mêmes une force de suggestion qui déjà nimbe l'événement à venir."
"C'est dans ce contact fugitif avec l'état de grâce que les grands footballeurs rejoignent les vrais artistes. Les uns comme les autres ne savent pas verbaliser, mettre leurs actes en concepts. Ils savent, sans pouvoir l'expliquer, trouver la bonne fréquence qui met toute leur technique au service du geste pur.
Le terrain de foot est une toile vierge: mille coups de pinceaux laborieux seront nécessaires pour un coup de génie."
"Mais il faut, dans l'oeuvre d'art qu'est un match de foot, distinguer la production de fioritures de la recherche de l'essentiel. Dans toutes les disciplines, il y a ceux qui donnent dans le décoratif et ceux qui font dans le fondamental. Le petit dribbleur est comme le soliste d'un grand orchestre qui jouerait trop fort en gesticulant."